INTERVIEW : Vincent RAVALEC                         

Mai 2007

ravalec

D’emblée, il reconnaît : « J’ai écrit un livre sur ce qui m’est arrivé… » A 45 ans, Vincent Ravalec évoque, là devant un verre d’eau gazeuse, son nouveau et vingt-neuvième livre, sobrement titré Hépatite C. Et comme si souvent chez celui qui, dans le passé, nous a offert Cantique de la racaille, Wendy ou encore Un pur moment de rock’n’roll, il y a du vrai, du faux, de la dinguerie… Point de départ : un écrivain est traité pour une hépatite C contractée dans les années 1970- au temps du punk, du sex and drugs and rock’n’roll. Chez Vincent Ravalec, le drame devient quasiment farce même si toujours, demeurent la maladie, le traitement nécessaire et lourd pour la combattre. Voici un livre comme on les aime : écriture débridée, ton déjanté, juste ce qu’il faut de pédagogie… Rencontre avec un auteur qui propose des variations sur un thème : « Il était un foie »…

Comment et pourquoi, malade, décide-t-on d’écrire sur cette maladie ?

Ce livre, Hépatite C, a répondu à une nécessité… Dès qu’il y a eu certitude que je souffrais de cette maladie et que j’ai commencé le traitement, j’ai changé mon fusil d’épaule. D’autant qu’avec les médicaments, il y avait de nombreux effets psychologiques. Et puis, cette hépatite C est une maladie « patiente », invisible…

Justement, comment avez-vous pressenti cette maladie invisible ?

Quand on a commencé à parler de cette hépatite C, j’ai tout de suite su que je faisais sûrement partie de la « population à risques ». Et comme je ressentais quelque fatigue, je suis allé consulter mon médecin. Puis passer des examens…

A quel moment avez-vous décidé de vous lancer dans l’écriture d’Hépatite C ?

En cours de traitement… Le résultat, c’est ce livre avec une part de réalité, une part de fiction… A la fin de l’écriture, j’ai éprouvé un soulagement artistique : je m’étais lancé dans cette affaire pour amener un sourire aux gens qui souffrent de cette hépatite, et je souhaitais également être explicatif car trop de personnes sont encore dans l’ignorance…

Aujourd’hui, les résultats de vos examens sont « dans le vert »…

… et a priori, je suis guéri. Mais le virus peut rester actif. Parce que pendant le traitement, on peut se débarrasser du virus mais il peut revenir. Il faut attendre au moins six mois après avoir terminé le traitement pour savoir si on est vraiment débarrassé.

Pour l’écrivain, la maladie est un bon matériau ?

La maladie est un excellent matériau d’écriture ! Bon, c’est vrai, je vous le concède, ce n’est pas très glamour…

Avec ce livre, vous aussi, vous avez succombé à l’autofiction !

L’expérience artistique peut transformer les choses. L’écriture, c’est une baguette magique… Bon, l’autofiction brute de pomme, ça ne présente pas grand intérêt à mes yeux. En effet, si le texte, si livre rapporte exactement la réalité, est-ce intéressant ? Personnellement, je suis très attaché à un petit basculement.

Avec Hépatite C, vous avez sacrément basculé ! Des murs qui se rapprochent, un couvent pyrénéen démoniaque avec des soeurs se gavant à l’héroïne et infiltré par une nymphomane, un groupe de parole nommé Les Amis de l’Hépatite C ou encore la menace d’attaque d’un ours qui veut manger du pain…

Je n’aime pas faire toujours la même chose- ma bibliographie en est bien la preuve. Dans ce livre, j’ai essayé de faire un truc simple, rigolo. Un livre facile à lire, plutôt drôle- et pour moi, de ce point de vue-là, le projet me paraît plutôt réussi.

Avouez que votre imaginaire est sacrément actif !

Mais il ne faut pas trop mettre de délire et d’imaginaire… Et moi, j’ai un imaginaire qui peut vite foisonner ! Alors, il me faut rester entre les deux : un peu de fantaisie, pas totalement collé à la réalité. Et puis, il y a un côté road movie dans ce livre avec un soupçon de fantastique. Oui, je crois bien que c’est là un roman plaisant et qui parle à tout le monde… Des gens m’appellent après avoir lu Hépatite C, ils me disent que la lecture leur a fait plus de bien que de mal- parce que, dans ce livre, il n’y a rien de pathétique ni de scandaleux. Et comme je suis d’un naturel optimiste, si je peux aider mon prochain, c’est volontiers. C’est dans cet esprit que j’ai écrit le livre…

On vous a connu aussi parolier pour Johnny Hallyday, réalisateur pour le cinéma…

J’aime vraiment écrire ! Et quelle que soit la forme d’expression, la démarche est toujours identique : il y a une série de questionnements, d’interrogations. C’est assez complexe et compliqué, peut-être même incompréhensible… Alors, j’ai un autre livre à venir, simple et rigolo parce que si j’ai plus de plaisir à écrire de gros pavés, il faut quand même vendre ! Et puis, il y a trois BD dont la toute récente Croyez en moi, les clés du pouvoir. En fait, j’ai envie de travailler avec des gens différents, de me frotter à des genres différents… Voilà pourquoi j’aimerai maintenant avancer dans mon projet d’écriture pour une série télé.

C’est étonnant, tous ces projets qui vous poussent vers les autres, alors que vous avez plutôt la réputation d’être un solitaire, un écrivain en marge…

Aujourd’hui, je suis dans une dynamique d’ouverture. Je peux ne pas rester tout seul, sûrement parce que j’ai moins d’enjeux, qu’à 45 ans mon ego n’est plus démesuré. Je suis beaucoup plus conciliant- du moins, tant que ça ne heurte pas trop ma sensibilité artistique. Oui, je peux aller vers les autres mais il faut du répondant !

Propos recueillis par ©Serge Bressan

 

>A lire : Hépatite C, de Vincent Ravalec. Flammarion, 182 pages, 16 €.

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