Novembre 2007
Un visage de brume. Une filmographie vertigineuse- 100 films, à ce jour. Un buste en Marianne dans les mairies de France dans les années 1980. Et ces mots : « On se trompe toujours sur la vie des gens célèbres. Les livres, les journaux ont tendance à romancer la vie des stars, à supprimer des aspects dérangeants ou les erreurs », murmurés par Catherine Deneuve. « La » Deneuve- comme on l’appelle. Une étoile du cinéma. Une femme française qui a fêté, le 22 octobre dernier, son 64ème anniversaire. Une légende, un mythe. Aussi, un mystère que, dans Deneuve. L’Affranchie, décode et décrypte Bernard Violet, spécialiste ès biographies. Et la star en prend un sacré coup. Avec révélations à l’appui…
Oui, Catherine Deneuve, c’est une « grosse
pointure »- comme dit mon éditeur ! Et puis, cette femme m’a toujours
fasciné. Autour d’elle, il y a un halo de mystère. Voilà un personnage qui a
toujours su préserver sa vie personnelle. Ça tombe, moi, j’aime fouiner !
Et comme souvent, avec Catherine Deneuve, il a fallu remonter à son enfance.
Là, on y trouve bon nombre d’éléments qui expliquent son personnage…
Son père. Maurice Dorléac était comédien. Il a tenu beaucoup
de petits rôles au cinéma. Pendant l’enquête, je me suis intéressé aux parents
de l’actrice. Et j’ai vu que son père a tourné dans pas mal de films pendant
Jusqu’à Deneuve.
L’Affranchie, jamais n’avait été évoquée cette période de la vie de son
père ?
Jamais. C’est une vraie révélation. Qui met en perspective
une bonne partie de la carrière de Catherine Deneuve. Qui explique, au moins,
ses débuts. Elle a trimballé longtemps l’héritage du père, les secrets de famille.
Oui, je maintiens que le passé trouble de son père est une des clés du mystère
Deneuve.
Vous avez idée du moment où elle a réussi à exorciser ce
passé paternel ?
Ce passé, j’en ai la certitude, a influencé son imaginaire.
Et elle s’en est servie pour ses débuts au cinéma. Elle a toujours prétendu
n’avoir jamais cherché à faire du cinéma. Mais n’oublions pas qu’elle a baigné,
gamine, dans cet univers. Elle est une enfant de la balle. Et dans l’entourage
des parents, il y avait les amis- dont deux journalistes, François Chalais et
France Roche, qui ont largement contribué à la faire avancer dans ce monde du
cinéma.
A ses débuts, Catherine Deneuve était surtout une grande
beauté. Sa sœur, Françoise Dorléac, elle, avait la vocation. C’était un talent
resplendissant. C’était loin d’être le cas de Catherine Deneuve à ses débuts.
Mais elle a toujours eu une qualité : elle a toujours été très lucide à
l’égard d’elle-même. Elle est calculatrice, habitée d’une ambition dévorante.
Ce qui n’empêche pas qu’elle soit une star du cinéma
mondial…
Une star, oui. Et sûrement la dernière star du 20ème siècle.
Mais chez elle, il y a toujours ce côté calculateur pour atteindre la gloire.
On lui reconnaîtra, certes, ses choix pour certains films risqués et sulfureux
mais demeure l’ombre du calcul : ne choisissait-elle pas ces films parce
que le scandale fait vendre ?
A son sujet, je parle de frénésie financière. Ses rapports à
l’argent sont très complexes. A ses débuts, quand elle partageait la vie du
réalisateur Roger Vadim, elle vivait sur un rythme très élevé- ce que ne manqua
pas de lui reprocher son père. Par la suite, quand ça s’est gâté pour elle et
qu’elle a moins tourné, elle a prêté son nom
des industries, à des soirées people, elle s’est fait payer pour sa
présence à des dîners. Elle sait monnayer sa participation- ce sont des sommes
en liquide, nettes d’impôts ! Elle a aussi créé sa société,
Pour un film, elle perçoit un cachet moyen de 450 000
euros. On est loin des sommes versées à Daniel Auteuil, Gérard Depardieu, Gad
Elmaleh ou Jamel Debbouze.
Elle n’a pas une grande conscience politique. Elle est
profondément égoïste, elle méprise les gens. Alors, oui, on la classe à gauche.
Pour la présidentielle 2007, elle a pris position pour Ségolène Royal mais
c’était au nom du féminisme. Et comment pourrait-elle être de droite ? En
France, la droite, c’est le gaullisme et après la guerre, les gaullistes n’ont
pas fait de cadeau à son père… Surtout, elle ne voit pas l’intérêt de s’engager
dans un parti : elle est une hypocrite, toutes ses prises de conviction
répondent à un calcul… Catherine Deneuve, c’est la gauche caviar ! Et les
gens ne s’y trompent pas : elle est populaire, oui, mais elle n’est pas
généreuse. Elle est reconnue, pas aimée…
>A lire : Deneuve.
L’Affranchie, de Bernard Violet. Flammarion, 482 pages, 21 €.
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